C’est en Lorraine qu’apparut au début du XVIIIe siècle la turlutaine ou serinette. Vraisemblablement inspirée par une mode de la Cour du Roi Stanislas de Nancy, elle fut fabriquée principalement à Mirecourt. Si bien décrite dans l’"Art du facteur
d’orgues" de dom Bedos
de Celle (1766), ce petit orgue à tuyaux d’étain, muni d’un cylindre pointé
actionné par une manivelle, fut tout d’abord destiné à donner la leçon de
musique aux serins de Canaris, qui étaient alors en vogue dans la noblesse et la
grande bourgeoise. Dans son "Traité des serins", Hervieux de Chanteloup (1745)
indique la façon très détaillée de s’en servir. En 1737 déjà, la serinette se trouvait
en bonne place chez le sieur Louis-Pierre Alba "sur une table de jeu entre des
fauteuils au point de Hongrie". Les genres musicaux évoluèrent aux fils des années : au XVIIIe siècle les répertoires mentionnaient surtout des marches, des préludes, des gigues, des menuets. Par la suite se seront des airs de vaudeville et enfin des airs populaires et enfantins. Les dernières produites peu avant 1914 étaient même vendues comme jouets dans les catalogues « Manufrance » ! Fin XVIIIe et début XIXe siècle se développa alors une grande activité de facture d’orgues de salon à cylindre de toutes tailles et de tous usages. Des registres de tuyaux en bois furent alors ajoutés permettant des sonorités plus riches. Certains reçurent même des registres de trompettes en bois ou en laiton, ainsi que des percussions. Certains orgues mécaniques furent construit pour l’usage religieux, sur la demande du clergé : orgues à cylindre (Moussey) ou à double usage cylindre et clavier manuel. Nicolas Antoine Lété (1793-1872), Didier Poirot (1806-1894) ou Clément-Dumont associés en 1832, en furent les plus célèbres facteurs. Dans la seconde moitié du XIXe siècle
en plus de la facture de petits orgues de rue, apparut aujourd’hui le Concert
Militaire. Comme son nom l’indique il avait une fonction de fanfare et était
particulièrement garni de trompettes, cornets et fifres, tambour et cymbale,
avec un répertoire principalement composé de marches, de quadrilles et de
valses. Si, jusque là, tous ces orgues avaient
fonctionné grâce au système du cylindre pointé, une révolution apparut avec
l’application par Gavioli, peu avant 1900, du carton perforé emprunté aux
métiers dit Jacquard. Ce système fut aussitôt adopté par les grandes maisons
parisiennes de facture d’orgues de foire de même que par Poirot Frères à
Mirecourt. Françoise Dussour |
De la Serinette à l'Orgue de foire |